On vit une époque de transcriptions tous azimuts, avec des intérêts variables. Il y a des réussites surprenantes, comme par exemple récemment Les Saisons de Tchaikovsky par le Trio Zadig. Le Trio Karénine propose ici Liszt, Schumann et Schoenberg.
Ttristia est une transcription par Liszt lui-même vers la fin de sa vie de la Vallée d’Obermann du cahier suisse des Années de pélerinage (dont le titre fait référence à un roman d’Étienne Pivert de Senancour et non à une quelconque vallée suisse existante). La pièce peut paraître parfois longuette, mais il y a des moments élégiaques – et tristes – magnifiques. On ne se répètera pas plus loin, mais le jeu des instrumentistes est magnifique, avec de très beaux timbres, de l’homogénéité et une interprétation vivante, de plus très bien enregistrée.
C’est un Schumann malade qui se réfugie en 1845 dans l’œuvre de Bach et écrit 6 pièces en forme de canon op.56 pour piano munis d’un pédalier comme un orgue. C’est l’organiste, pianiste et chef Theodor Kirchner (1823-1903) qui réalisa cette transcription de pièces assez mélancoliques et d’un flux musical prenant.
Le pianiste Eduard Steuermann (cf. musicologie.org) a réalisé la transcription pour trio de La Nuit transfigurée de Schoenberg (il créera son Concerto pour piano sous la direction de Leopold Stokowski). Sans posséder tout à fait les atouts expressifs de la version originale pour sextuor à cordes (Pražák) ou de l’arrangement pour orchestre à cordes de Schoenberg lui-même (Karajan) – l’utilisation du piano donne un aspect un peu « terrien » – cette transcription suscite l’intérêt de par la qualité de l’interprétation (notamment ici l’impression de liberté donnée par la pianiste).
Un disque superbe, en souhaitant longue vie à ce trio dont j’apprends qu’il vient de changer de violoniste.