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Henri Dutilleux – 2e symphonie – 2nd symphony

Henri Dutilleux – 2e symphonie – 2nd symphony

Henri Dutilleux
Henri Dutilleux

L’aîné des compositeurs français vivants, âgé de 96 ans, Dutilleux aura été une des figures marquantes de la musique du XXe siècle.

Pour aborder son œuvre, on peut certes commencer par la musique de ballet Le loup dont il existe un fameux enregistrement par Georges Prêtre, repris d’ailleurs dans un coffret économique de 5 CD chez Virgin, mais aussi par cette 2e symphonie « le Double » (1959). Le fameux couplage Tout un monde lointain avec ce concerto pour violoncelle de Lutoslawski par Rostropovitch montrait bien l’antagonisme de style entre les deux compositeurs : au dynamisme un peu rude du Polonais répondait l’élégance et le raffinement du Français.
 Une citation de Nicolas Darbon à propos de la musique de Dutilleux   : « chaos momentanés, brouillards rythmiques, éloignement tonal, vaporisation mélodique, clusters harmoniques sur des tenues pianissimi ».

Pour Henri Dutilleux : « le processus de mémoire joue un grand rôle dans la plupart de mes partitions ». Effectivement, l’approche de la musique de Dutilleux nécessite un attention certaine, malgré un langage harmonique qui n’heurte pas.

Une fois surmonté un certain hermétisme dû à la complexité de la construction et à une certaine uniformité apparente de ton, on se repaît ensuite des couleurs et des ambiances si poétiques de cette musique.

L’ostracisme ambiant en France vis-à-vis des compositeurs qui n’étaient pas dans la ligne « Boulézienne » fit que Dutilleux dut se tourner vers l’étranger pour des commandes (Koussevitsky, Szell, Ozawa…). Il semble d’ailleurs que  son jeune cadet Boulez n’ait jamais dirigé sa musique alors qu’il l’a fait il y quelques années pour André Jolivet, qu’il surnommait pourtant « joli navet » dans sa jeunesse. Néanmoins  le « boulézien » Philippe Manoury déclarait dans un récent ouvrage considérer le quatuor Ainsi la nuit comme un chef d’œuvre absolu.

On a comparé les versions Barenboïm, Bychkov et Tortelier (il existe par ailleurs Graf, Munch, Plasson et Saraste). Mentionnons que le titre Le double fait référence au fait qu’il y a deux ensembles instrumentaux qui se répondent : un groupe de 12 instruments (dont un clavecin) et l’orchestre. Mais c’est bien difficile à percevoir au disque.

L’œuvre commence par un motif incantatoire qui fait irrésistiblement penser au Loup. Les trois mouvements seront une suite de variations,  notamment sur ce motif. On a pu parler à propos de cette symphonie des influences croisées de Schoenberg (Dutilleux cite volontiers Farben des 5 pièces op. 16), Debussy ou Stravinsky. Si l’on entend effectivement certaines ambiances du Sacre dans le 3e mouvement, on pourrait aussi se référer au dernier Honegger, à Bartok, voire à Dukas… 

Des trois versions, bien que le compositeur a déclaré très apprécier celle de Tortelier, on a retenu plutôt Barenboïm pour le soin donné aux phrasés et aux couleurs, mais il nous semble que Bychkov y donne un peu plus de dynamisme. En outre, son disque se poursuit avec Timbres, espace, mouvement (1978) (mais on a l’impression d’entre la suite du Double…) et surtout les Métaboles (1964), œuvre phare du compositeur.

Dutilleux - Orchestre de Paris - Semyon Bychkov
Dutilleux – Orchestre de Paris – Semyon Bychkov

 The elder of French composers – 96 years old -Henri Dutilleux will have been one of the outstanding figures of the music of the XXth century.

To approach his work, one can certainly begin with the ballet music Le loup – there is a famous recording by George Prêtre, included in an economic box of 5 CD at Virgin -, but also by this 2nd symphony “the Double” (1959).
The famous coupling Tout un monde lointain with the cello concerto by Lutoslawski performed by Rostropovitch showed well the antagonism of style between the two composers: the rather hard dynamism of the Polish comparing to the elegance and refinement of the French. 
A quotation by Nicolas Darbon in connection with the music of Dutilleux   : “temporary chaos, rhythmic fogs, tonal distance, melody vaporization, clusters harmonic on pianissimi”. For Henri Dutilleux: “the process of memory plays a great part in the majority of my partitions”. Indeed, the approach of the music of Dutilleux requires an unquestionable attention, in spite of a harmonic language which should not bother much.

Once overcome a certain hermetism due to the complexity of construction and an apparent uniformity of tone, one goes back to the colors and so poetic environments of this music. Ambient ostracism in France with composers who were not in the “Boulezian” line made Dutilleux to turn to the foreign countries for commissioning (Koussevitsky, Szell, Ozawa…). It seems besides that Boulez never conducted his music whereas he did it a few years ago for André Jolivet, whom he called “pretty turnip (joli navet)” in his youth.

Nevertheless, the “boulezian” Philippe Manoury stated in a recent book that Ainsi la nuit was an absolute chef d’œuvre. We have compared the Barenboïm, Bychkov and Tortelier versions (there is in addition Graf, Munch, Plasson and Saraste). Let us mention that the title Le double refers to the fact that there are two instrumental sets: a group of 12 instruments (including a harpsichord) and the orchester. But it is quite difficult to perceive it on a stereo set.

Work starts with a “plaintive call” which irresistibly makes think of Le loup. The three movements will be a succession of variations, in particular on this motive. Influences have been quoted about this symphony: Schoenberg (Dutilleux quotes readily Farben of the 5 pieces Op. 16), Debussy or Stravinsky. If one hears indeed certain patternss of Le sacre in the 3rd movement, one could also refer to the last Honegger, Bartok, even Dukas… 
Of the three versions, although the composer stated he appreciated the Tortelier’s one, we rather prefered Barenboïm for the care given to phrasing and colors, but it seems to us that Bychkov gives to it a little more dynamism. Moreover, his CD continues with Timbres, espace, mouvement (1978) (but it gives the impression of a continuation of le Double…) and especially Métaboles (1964), a more famous work by Dutilleux.