Witold Lutoslawski – Concerto pour orchestre
On fera peut-être un recensement de toutes les œuvres symphoniques du XXe siècle comprenant une partie de piano… Composée de 1950 à 1954, cette œuvre sera créée par son commanditaire et dédicataire, Witold Rowicki, 10 ans après celui de Bartók. Pour notre mélomane de bonne volonté, s’il est allé jusqu’au Concerto pour orchestre de Bartók, il ne sera pas vraiment dépaysé… 3 mouvements : Intrada, Capriccio notturno e Arioso et Passacaglia, Toccata e Corale ; l’œuvre dure environ 30′. Souvent couplée à celui de Bartók, il a été néanmoins moins souvent enregistré : on en a recensé une quinzaine de versions. On n’a pu avoir avoir accès à celles de Kletzki, A. Davis, Ozawa ou Botstein. Tableau des versions : lutoslawski-concerto-orchestra
1er mouvement
Rowicki – Warsaw National Philharmonic Orchestra – 1964 La version du dédicataire et créateur donc, dans une très belle prise de son. L’orchestre sonne un peu mince, c’est plutôt léger, élégant, très chantant, l’accent est mis sur le côté pseudo-folklorique de la partition. Sonorités et direction captivantes. 8 Kleinert – Rundfunkt Symphonic orchestra Berlin – 1967
Chef d’orchestre allemand (1911-1975), qui aidera au maintien de cet orchestre de l’Allemagne de l’Est de l’époque, avec Hanns Eisler, après l’édification du mur de Berlin en 1961. C’est très vivant, dans un tempo mesuré, manque parfois de couleurs. 8
Lutoslawski – Polish Radio National Symphony Orchestra – 1978 Prise de son très dynamique, un peu dure, timbres âpres, rythme très marqué, une barre de mesure peut-être un peu trop présente, mais superbe ambiance à la fin. 8
Dohnanyi – Cleveland – 1990 Quel contraste … par manque de contrastes… de relief, pourtant la prise de son privilégie les cuivres, mais rien ne fonctionne, la fin est délicate mais un peu éthérée. 6
Barenboïm – Chicago – 1993 C’est lent, éteint. 5 Salonen – Los Angeles – 1995 – Live De l’allure dès le début, c’est moins âpre que la version du compositeur, mais l’orchestre est meilleur, les ambiances sont plus convaincantes et c’est supérieurement dirigé. 9
Tortelier – BBC Philharmonic – 1995 C’est bien conduit, mais la qualité de l’orchestre est moindre; le début manque de drive, mais la fin est bien venue. 7,5.
Wit – Polish National Radio Symphony Orchestra – 1998 Tempo légèrement retenu, l’entrée des violons façon « Les dossiers de l’écran » (mais le générique est de Morton Gould) est bien venue, percussion aiguë un peu envahissante à la fin. 7,5
Jarvi – Cincinnati Symphony Orchestra – 2006 Ça commence bien les premières mesures, après le rythme s’éteint un peu. Comme pour le concerto pour orchestre de Bartók, figurant d’ailleurs sur le même CD, ce n’est pas une réussite pour ce chef si apprécié maintenant à la tête de l’orchestre de Paris. 6
Chung – Orchestre Philharmonique de Radio France – 2009 Élégant, juste, tenu, mais sans poids ni relief. Malgré la rigueur du chef et sa technique, ça sonne un peu mou ; la 3e partie est mieux venue, avec des timbres enchanteurs de l’orchestre. 7,5
Gardner – BBC Symphony Orchestra – 2010 Peu à dire : c’est très bien fait mais ça n’emballe jamais, ça sonne un peu anglais. 7
Saraste – London philharmonic – 2011 Très beau début, animé, détaillé, de belles tournures et des sonorités très bien dosées. Ce n’est pour rien qu’il a étudié avec Esa Pekka Salonen. 8,5
Jansons – Symhonieorchester des Bayerischen Rundfunks – 2011 C’est le seul enregistrement où on entend le piano dans les premiers accord… Il faut dire que le tempo est bien lent. L’orchestre est évidemment superbe, très belle maîtrise du chef, excellente prise de son qui plus est. Une des plus belles réalisations mais c’est un peu placide. 7,5
2e mouvement
On reste donc avec Rowicki, Kleinert, Lutoslawski, Salonen et Saraste.
Rowicky – C’est très virtuose, enlevé, timbré, vivant. Prise de son toujours efficace même si elle manque parfois de naturel. Ce concerto sonne moins MittelEuropa que celui de Bartók, avec des arêtes vives, des sonorités franches, des rythmes un peu carrés, le mustère cède le pas à l’efficacité. 8
Kleinert – Encore plus rapide, plus détaillé (on entend distinctement le piano), ça a une « gueule » impressionnante ; un grand chef méconnu. 9
Lutoslawski – Cà a un moins de drive que les précédents. Comme pour Stravinski, ce n’est pas forcément le meilleur interprète de ses œuvres… Disons que c’est un peu appliqué parfois, avec à d’autres passages un plus grande force, un peu brutale. 7,5
Salonen – Interprétation plus cristalline que les 2 premières, c’est moins tranchant mais avec des timbres plus raffinés. Ensuite, c’est supérieurement dirigé. 9
Saraste C’est un peu plus décoratif, avec une prise de son moins claire. C’est bien fait, mais ça manque de nécessité. 7,5
3e mouvement
Il nous reste donc Rowicki, Kleinert et Salonen.
Rowicki – Belle ambiance nocturne au début, de l’animation. Comme pour Bartók, ce n’est pas une de ses meilleures œuvres et pourtant elles frappent toutes deux tant l’oreille que l’esprit. 8
Kleinert – C’est plus « tout » : âpre, tendu, tenu. C’est magistral. 9,5
Salonen – Prise de son plus actuelle, on entend mieux le piano ; depuis le début, c’est la version – excellente – qui me fait le plus penser à Hindemith… C’est superbe, mais moins démiurge que le précédent… 8,5