Oui, Julius Reubke (1834-1858) même ; j’avais bien aperçu de temps à autres ce nom, notamment pour sa sonate pour orgue, mais sans aller plus avant ; recevant de CD avec les Sonates pour piano et pour orgue, qui plus est sous les mêmes dix doigts féminins, je me suis lancé dans l’écoute.

On est à l’aise avec la Sonate pour piano : écrite en 1857, elle suit d’environ quatre ans celle de son professeur Franz Liszt. D’une durée d’une demi-heure, c’est bien le pendant de la Sonate de Liszt, avec ses glissandi, arpèges, ruptures, liquidités, sa structure cyclique. Ce n’est pourtant pas l’œuvre d’un épigone ; si l’oreille se dresse parfois en entendant certaines tournures bien lisztiennes, on est pris par l’œuvre tout du long grâce aux nombreuses idées musicales et à leur traitement – œuvre qui a d’ailleurs le bon goût de ne pas finir longuement morendo.

De l’abattage sans excès, une compréhension intime de l’œuvre : un grand bravo pour Alma Bettencourt, qui joue un bel instrument, de plus bien enregistré.

La Sonate pour orgue a été plus souvent enregistrée, à commencer par Edward George Power Biggs en 1941 à Harvard.  (À noter que Jean Guillou avait déjà enregistré ce couplage en 1989). 
Elle est sous-titrée « Psaume 94 » (Dieu des vengeances, Éternel! Dieu des vengeances, parais! […]) et inspirée par la Fantaisie et Fugue sur le choral « Ad nos, ad salutarem undam » de Liszt (1852). 
Le livret met en exergue les extraits du psaume relatifs à chacun des mouvements, excellente idée compte tenu des liens entre musique et texte dans cette sonate. C’est une œuvre dramatique, parfois presqu’enfiévrée, avec un dernier mouvement plein de panache.
Je n’ai pas comparé avec les versions Guillou, Richter ou Preston notamment, mais l’œuvre m’a paru très bien interprétée, utilisant avec finesse et autorité le fameux orgue de la basilique Saint-Sernin de Toulouse, ici aussi très enregistré.

Une réussite du label Rocamadour.