Pascal Dusapin – 7 solos pour orchestre, …
Pascal Dusapin (*1955) est un compositeur assez prolixe qui malgré son air toujours jeune approche donc la soixantaine. Réputé avoir été influencé notamment par Xenakis, Varèse et Donatoni.
Ce 1er CD fait presque figure d’ancêtre de la musique contemporaine, ayant été enregistré en 1987-1988 par Paul Méfano à la tête de l’ensemble 2e2M et comprenant 5 œuvres des années 80 : Fist, Hop‘, Musique captive, Aks, Niobé.
J’avoue que, seule, la 2e pièce, Hop’ m’a intéressé, avec son discours structuré et de belles « images ». De toutes façons, ce CD est introuvable.
Sautons presque 20 ans, avec 7 Solos pour orchestre, composés entre 1991 et 2008, œuvre qui a été en « devenir » pendant ces années, faisant penser au processus de composition de Jagden und Formen de Wolfgang Rihm, que nous avions récemment chroniqué, un cycle présentant également des relations entre pièces.
C’est très frappant de voir l’évolution du langage du compositeur : depuis les musiques pour petit ensemble citées plus haut, le langage semble s’être assagi, la musique est moins heurtée, avec des continuités, des arches quasi mélodiques, plus d’expressivité et est ainsi plus accessible. On pense parfois à des strates à la Sibelius ou à la délicatesse sonore d’un Dutilleux. Le tout est interprété par l’orchestre philharmonique de Liège dirigé par Pascal Rophé (2008-2009).
L’une des pièces qui m’a particulièrement frappé est le n°2 Extenso, citons le compositeur : Le titre Extenso s’amuse avec le mot extension et l’expression latine in extenso qui signifie « en entier, dans toute son étendue ». Mais ici il s’agit surtout d’ex-tendre la forme en prélevant un peu de la substance mélodique de Go. Cette matière est dépliée, puis courbée et repliée par fronces successives jusqu’à la totale transformation de ses caractéristiques originelles. Froncer, c’est plisser en contractant. La fronce est ici associée aux principes de reproduction et d’hybridation. Pour la composition des autres solos, je retournerais souvent vers Extenso, afin d’y déraciner quelques fragments et de les replanter ailleurs. Mais eu égard à la forme de Go, les mouvements topologiques du début d’Extenso s’incarnent dans la matière musicale de façon divergente. À l’inverse de ce qui se passe dans Go, la note de départ jouée par les violons, à l’unisson encore, va immédiatement choisir de se déployer sur la presque totalité du registre de l’orchestre et réduire progressivement son ambitus en le comprimant. Extenso commence par dérouler un espace harmonique constitué par des lignes mélodiques qui s’affaissent graduellement et s’enveloppent en répétant leurs identités premières. Cette matière va doucement se renverser et se courber jusqu’à une position harmonique verticale par blocs d’accords vers le grave de l’orchestre, puis se transmuter ailleurs, jusqu’à la fin, en d’incessants mouvements reptiliens. Le principe variant est celui du retournement. La forme se retourne ».
C’est une œuvre d’une superbe orchestration, toujours élégante, la musique est vivante, quasi organique, c’est superbe.
Ici, les 4 premières minutes d’Extenso :