Une oeuvre dodécaphonique de 1942 en 4 mouvements : Andante , Molto allegro, Adagio & Giocoso. Schoenberg aura donné des titres à chacun avant de se rétracter : « La vie était si facile, « Soudain, une animosité apparaît », « Une situation grave s’est créée », « Mais la vie continue ». Comme quoi, la métaphysique mise à part, ses préoccupations – disons sentimentales – restaient prégnantes – mais, surtout, un programme quasi-romantique pouvait bien être adapté à de la musique sérielle !Créée en 1944 à la NBC par Stokowski et Eduard Steuermann, cette partition de 20 mn environ a été enregistrée par (enregistrements commerciaux ou pirates, d’après l’Arnold Schönberg Center) :
Claude Helffer / René Leibowitz (1952?),
Glenn Gloud /Jean-Marie Beaudet (1953),
Edward Steuermann / Hermann Scherchen (1954),
Alfred Brendel / Michael Gielen (1957),
Glenn Gould, Dimitri Mitropoulos (1958),
Glenn Gould / Robert Craft (1961),
Peter Serkin / Seiji Ozawa (1968),
Alfred Brendel Rafael Kubelik (1971),
Alfred Brendel / Bruno Maderna (1973),
Peter Serkin / Bruno Maderna (1973),
Adam Fellegi / Ivan Fischer (1979),
Peter Serkin / Pierre Boulez (1985),
Anatolii Vedernikov / Igor Blazhkov (1986),
Maurizio Pollini / Claudio Abbado (1988),
Theo Bruins / Riccardo Chailly (1989),
Emmanuel Ax / Esa-Pekka Salonen (1992),
Alfred Brendel / Michael Gielen (1993),
Amalie Malling / Michael Schonwandt (1994),
Mitsuko Ushida / Pierre Boulez (2000),
Christopher Oldfather / Robert Craft (2000).
Pour répondre à ses détracteurs qui ne voyaient en lui qu’un compositeur cérébral, il est piquant de voir qu’il citait dans ‘Heart and brains’, essai de 1946, le début de concerto en tant que musique qui vient du cœur, alors qu’il s’agit d’une musique parfaitement sérielle :
On a comparé les version Brendel / Kubelik (1971), Peter Serkin / Boulez (1985) et Uchida / Boulez (2000).
Dès le 1er mouvement légèrement valsant, on laisse de côté le fils Serkin : version très lisible mais il ne se passe rien. La différence est sidérante tant entre Brendel et Uchida qu’entre Kubelik et Boulez. Les premiers jouent cet Andante en 4’45 contre 4’28. Malgré cette relativement faible différence, on a 2 versions parfaitement opposées : la première est plus phrasée au piano, il y de superbes atmosphères conformes d’ailleurs au titre donné par Schoenberg, au prix d’une lecture peut-être un peu lâche, alors que la 2e est très rythmée, presque motorique, mais plus en noir et blanc.
Le 2e mouvement fait apparaître les mêmes différences, le piano de Brendel est plus beau, la lecture de Kubelík plus ‘organique’ et colorée, mais on peut préférer le piano percussif d’Uchida ici.
Cette fois, Le 3e mouvement est plus rapide chez Kubelík. avec encore de très belles sonorités et atmosphères, mais, là, Boulez est plus expressif, avec un discours plus structuré, un mouvement tenu de bout en bout.
Le dernier mouvement, un rondo giocoso, a curieusement parfois un aspect Prokoviev… Comme le dit Misuko Ushida, la fin sonne un peu creux, un peu comme le final de la 7e de Mahler. La version Uchida / Boulez est très allante, d’une couleur bien adaptée. La version Brendel / Kubelík est plus posée, avec peut être plus de dialogues marqués piano / orchestre.
En conclusion, l’amateur peut choisir entre la version plus poétique de Kubelík et celle plus décidée de Boulez. Il sera assuré d’entendre en 20′ au moins autant de musique que dans un concerto de Beethoven…
Mise à jour – 25/4/2015
Schoenberg avait coutume que sa musique n’était pas moderne, mais simplement mal jouée… On ne sait pas quand a été donné ce concert à Vienne, sans doute une des dernières apparitions de Boulez chef d’orchestre. La prise de son est somptueuse, l’orchestre sonne magnifiquement et paraît très impliqué, le piano a une sonorité parfois un peu clinquante, mais Barenboïm, contrairement aux récents concertos de Liszt avec le même Boulez, est à son affaire, splendides articulations. Une version tout en lumière, celle qui éclaire le mieux la partition, même si les version Uchida / Boulez & Brendel / Kubelik gardent leurs atouts.