Alors que je recevais un bel objet de 2 CD des 5 concertos pour violon de Mozart par l’ensemble Les Dissonances de David Grimal (avec un DVD reprenant les mêmes œuvres), paraissaient également les N° 1, 3 & 4 par Frank Peter Zimmermann chez Haenssler Classics.
J’ai hésité avant d’écrire ce papier : j’ai entendu récemment Frank Peter Zimmermann avec Ashkenazy / Philharmonia dans le concerto de Mendelssohn : superbe violoniste, mais qui manquait par trop de projection sonore ; quand à David Grimal, un extrait de sa 7e de Beethoven sur son site me donna plutôt envie de fuir… C’est que cet ensemble joue et se revendique sans chef, à la manière du fameux orchestre symphonique russe Persimfans dans les années 20 (il y eut même à l’époque des orchestres uniquement féminins et sans chef). Mais du temps de Mozart, c’était le soliste qui dirigeait l’orchestre. Dans le DVD de David Grimal, le violoniste prend soin de montrer qu’il ne dirige en rien son orchestre (pour faire encore plus égalitariste, il aurait pu jouer assis… mais j’arrête-là mon mauvais esprit).
« Historiquement informés » ?
On lira avec intérêt dans le livret du coffret le dialogue entre David Grimal et le compositeur Brise Pauset, auteur par ailleurs des cadences dans cet enregistrement. On y lit toutefois que les Munch, Toscanini, Reiner ou Dorati « pas ceux qui ont forcément vendu le plus disques » (?) étaient en quelque sorte des précurseurs du renouveau de l’interprétation des œuvres du 18e siècle.
L’Orchestre des Dissonances joue avec des archets anciens, des cors naturels, mais aussi avec des instruments modernes pour les bois.
L’Orchestre de chambre de l’Orchestre symphonique de la Radio Bavaroise est donc issu de l’orchestre : il se dédie au répertoire pour cordes, appelant en renfort des membres de l’orchestre symphonique pour d’autres répertoires, comme ici. Il est dirigé par Radoslaw Szulc, son co-fondateur en 1999.
Pour apprécier les « méfaits » de la Seconde guerre mondiale sur l’évolution de l’interprétation, on comparera le 3e concerto avec l’enregistrement (choisi par hasard…) de 1959 de Gioconda de Vito / Kubelík / London symphony (EMI – préférable à la version avec Beecham de 1951) .
Allegro
De Vito : (on rappellera qu’après avoir remporté un premier prix de violon à un concours à Vienne, Jan Kubelík vient lui baiser la main…). Elle devait arrêter complètement le violon deux ans plus tard. On est ici dans le style ‘galant’. L’orchestre est alerte, accompagne parfaitement la soliste. Le violon est « joli », pas toujours complètement juste ni propre, avec quelques glissandos. La cadence est peu pénible. On laissera là.
Zimmermann : on est plus dans un esprit musique de chambre, c’est plus lent, les traits d’archet sont plus variés, avec une atténuation du son en fin de phrases un peu systématique tant pour le soliste que pour l’orchestre. On manque un peu de l’allant de Kubelík, mais on gagne en intimité avec la musique, avec une lecture bien plus contrastée du soliste, dans un style très chanté.
Grimal : il y a quelques effets curieux, comme l’accord presque arpégé à 5. Le violon est un peu moins beau de son que celui de Zimmermann, moins tranchant, mais la lecture est très engagée et plus libre de ton. Belle et courte cadence.
Adagio
Zimmermann : Quel beau violon ! Une prouesse de varier la sonorité, le vibrato et la dynamique tout en conservant une belle ligne de chant. On espère qu’il va pouvoir garder son violon : see. On est toujours dans une ambiance musique de chambre, quand même plus gratifiante que l’orchestre traditionnel de Kubelik, certes dans une prise de son vieillie.
Grimal : Mêmes remarques que pour le I : c’est moins sophistiqué, mais très vivant et prenant (prises de concert).
Rondo
Cette fois, on préfère Grimal : l’orchestre est moins clair, mais le violoniste nous emporte avec lui.
Conclusion
- Un bon chef ne nuit pas.
- On est plus concerné par ces versions que par celles du passé.
- Le choix entre les deux versions est une question de goût…