Moments musicaux par Véronique Bonnecaze

C’est toujours avec un bonheur anticipé que l’on reçoit un enregistrement de Véronique Bonnecaze. Après Chopin et Debussy, c’est son quatrième CD paru chez Paraty ; il faut dire que, de Scarlatti à Prokofiev, elle nous enchante toujours.
Elle met en regard ici les moments musicaux de Rachmaninov et ceux de Schubert.

Les moments musicaux de Rachmaninov ont été enregistrés par tous les grands pianistes russes. Je n’ai par contre pas trouvé d’exemple de ce couplage, pourtant évident, même si le rassemblement des pièces de Schubert est une création de son éditeur.

Avant de commencer l’écoute, je me suis remémoré un de mes vinyles fétiches : ces Moments musicaux de Schubert par Karl Ulrich Schnabel (le fils) dont je me pâmais tout jeune en écoutant en boucle le sixième. Je l’ai remis – le disque pleure (ou ma platine), mais j’ai reconnu tout ce qui me plaisait à l’époque : des tournures, des phrasés presque paysans, une liberté rythmique, un pianisme un peu « rond ». Je me suis dit que je ne retrouverai peut-être pas cela chez Véronique. Et bien non, car j’ai trouvé mieux…
Il est probable que l’ancienneté de prises de son des années 40 à 60 ait pu conférer à certains enregistrements pianistiques une aura légendaire – aura que Véronique et moi récusons parfois – d’un naturel prudent, je ne citerai pas de noms.
Mais quand on écoute une technique de piano qui n’a pas de caractère « incertain » – mot de mon ami Philippe Entremont qui pouvait se le permettre – il fera ses adieux à la scène en février prochain – une pianiste qui étudie et maîtrise autant l’œuvre que les notes et propose à chaque pièce une véritable expérience musicale, avec un très beau piano bien capté, on ne regrette pas les « vieilles cires ». 

Les Moments musicaux de Rachmaninov sont six pièces de structures et d’atmosphères très variées, même s’il ne faut pas y attendre du Chabrier ou du Satie bien sûr.  Comme le dit dans le beau livret de Jean-Yves Clément, on passe du Schubert le vocal à Rachmaninov l’orchestral ; deux mélancolies  aussi différentes que prenantes.

Je ne vais pas détailler ici ces douze merveilles, mais je réécoute encore mon cher 6e moment de Schubert qui résume à lui seul toutes les grandes qualités de celle qui est l’une des toutes meilleures pianistes françaises (j’ai interviewé toutes les meilleures – du moins à mon goût – prochainement : le Duo Jatekok, mais pas elle : « je n’ai rien à dire sur moi ! ». 

C’était lundi dernier, mais le RER A n’a pas voulu que j’y assiste… :

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