Cela fait bien dix fois que j’écoute La Mer et les Images par Emmanuel Krivine à la tête de l’Orchestre national de France : il est rare, notamment dans les « tubes », qu’un disque vienne renouveler la discographie d’une œuvre, un peu comme il y a bien longtemps la Fanstastique par Tilson-Thomas.
Je n’ai jamais entendu ces chefs en concert. Je me rappelle des premiers concerts de Krivine, frais nommé à la tête du Philharmonique de Radio-France après avoir abandonné le violon : le public avait hué son interprétation d’une symphonie de Brahms…
De Paris, Krivine est passé à Lyon, au Luxembourg avant de revenir à Paris et d’être nommé à la tête de l’Orchestre national de France en septembre dernier, 40 ans après le dernier français à sa tête, Jean Martinon.
Cet enregistrement a été réalisé en mars et octobre de l’an denier, soit huit ans après le même programme à la tête du Philiharmonique de Luxembourg édité chez Timpani, label pour lequel il avait enregistré nombre de programmes de musique française. On ne sait quoi admirer le plus : la qualité instrumentale sidérante, les timbres aussi précis que sensuels, une rythmique aussi libre que tenue, mais surtout la respiration. Écoutez par exemple les Rondes de printemps avec un détail inouï de l’orchestration et « en même temps » une agogique très libre, très Jeux. L’exécution de cette même pièce avec le Philharmonique du Luxembourg présente des équilibres différents, une très belle ambiance générale, mais elle apparaît un peu moins ductile et moins riche en timbres, un très beau disque cependant.
Un peu anecdotique : le récent enregistrement propose le Dialogue du vent et de la mer dans la version originale de 1905 avec une fanfare que Debussy supprimera en 1909.
Un grand disque pour le centenaire.