Brève rencontre avec Emmanuelle Swiercz-Lamoure
On avait fort apprécié ses deux récents disques Chopin (Nocturnes et Valses), l’impression ressentie d’avoir affaire à une pianiste de grande classe était corroborée par un récent récital Salle Gaveau.
On s’est rencontrés rapidement à la faveur d’un déjeuner :
Emmanuelle a commencé le piano « seulement » à l’âge de 9 ans. Née de parents non mélomanes, son père notamment (un entrepreneur) aurait bien voulu qu’elle poursuive des études scientifiques, mais, devant son don manifeste, ses parents lui apportèrent leur précieux soutien. Elle intégrera à 16 ans le CNSMP. Elle suivra les cours de Michel Béroff et Denis Pascal. Elle suivra ensuite le 3e cycle avec Marie-Françoise Bucquet et de nombreuses master-classes, avec György Sebök notamment, pianiste qui l’a beaucoup marquée.
Elle passera quelques concours, même si l’exercice ne l’a jamais passionnée. « Oui j’avais le trac, je l’ai toujours d’ailleurs avant chaque concert : c’est un stimulant essentiel. Mais il faut bien avouer qu’être lauréate met le pied à l’étrier pour la carrière. J’ai effectué ces dernières années des tournées à l’étranger et notamment en Chine, au Japon, au Vietnam, où j’ai été frappée par la jeunesse et l’enthousiasme du public ; les gens y sont très spontanés, il ne faut pas se formaliser de ce que certains prennent carrément leur dîner pendant le concert… que de séances de selfies avec eux ensuite, en famille ! C’est très réconfortant pour l’avenir de la musique classique, qu’ils connaissent d’ailleurs très bien. ».
Quand je lui demandai le nombre de concerts qu’elle donne en moyenne annuellement, elle me répondit: « Ce doit être un ou deux par mois, mais c’est en fait très variable. Je vais faire prochainement une tournée au Japon, puis je vais travailler le 1er concerto de Brahms que je donnerai à Dijon quelques semaines plus tard. Je cherche surtout un équilibre de vie entre la musique et ma famille, mon fils de cinq ans, les amis, les voyages… ».
Son répertoire s’étend de la musique baroque à la musique contemporaine. « Kurtag, avec qui j’ai pris des cours, Dutilleux, Tanguy, Crumb, Ligeti, Boulez ou encore Alain Bonardi. Mais en fait je joue assez peu de partitions contemporaines. »
Je lui ai demandé si elle connaissait Scriabine : « Je l’ai joué beaucoup à mes débuts, on avait d’ailleurs enregistré l’intégrale pour piano avec quatre autres pianistes. Ensuite je suis passée à Rachmaninov, Schumann, Liszt ; quant à Chopin, je ne l’ai vraiment pratiqué que récemment, avec les deux derniers enregistrements dont le programme m’a d’ailleurs été proposé par Philippe Maillard. »
Son panthéon pianistique : parmi les anciens, Horowitz ou Gould (« qui me fascine, même si je n’adhère pas à certaines de ses interprétations ») et pour les pianistes vivants Volodos, Lupu, Perahia, Anderszewski, Angelich ou Kissin pour en citer quelques-uns.
« J’ai pratiqué la musique de chambre, c’est très enrichissant et cela permet de sortir de la grande solitude du pianiste. J’ai aussi participé en 2014 au Théâtre des Bouffes du Nord à un spectacle de Denis Podalydès autour des « Méfaits du tabac » de Tchékhov avec l’excellent comédien Michel Robin – c’est une expérience qu’il me plairait de renouveler ».
Une brève rencontre donc, très plaisante, ne pas manquer son prochain concert !