Brahms par Arcadi Volodos
Je n’avais jamais écouté en live Arcadi Volodos, pianiste d’origine russe âgé de 45 ans, élève en son temps de Jacques Rouvier ou Dmitri Bashkirov. Il jouait hier soir le 2e de Brahms avec l’Orchestre de Paris dirigé par James Gaffigan.
Phénoménal, ébouriffant, c’est ce qui venait à l’esprit jeudi dernier. Une projection du son énorme, toutes les notes sonnent merveilleusement, y compris certains contrechants souvent inaudibles, avec une grande empathie avec la partition. Son interprétation est fraîche et joyeuse, aux couleurs vives et contrastées et on n’est pas près d’oublier l’envolée du 4e mouvement…. Il fallait le voir écouter, voire interpeller les instrumentistes et tout d’un coup se mettre à sa partie, comme pour une improvisation. A peine un coup d’œil au chef… Il ira d’ailleurs lors des applaudissements féliciter le violoncelliste solo du 3e mouvement, l’excellent Eric Picard je crois. Dommage que la direction, propre, manageant bien les équilibres, obtenant parfois de beaux à-plats aux cordes soit un peu décevante, malgré une belle prestation de l’orchestre, très impliqué. Je disais à mon ami Régis Campo qui m’accompagnait que ce devait être l’âge qui me faisait regretter la fougue et l’engagement des vieux chefs comme Furt, Kubelik, Munch et consorts, mais il m’a rassuré… J’avais pourtant bien apprécié ce chef dans Tout un monde lointain avec Emmanuelle Bertrand et dans des symphonies de Prokofiev, j’espère entendre mieux quand je recevrai le Concerto de Brahms par Vadim Gluzman.
Et voilà que Arcadi Volodos sort un disque Brahms chez Sony… Au programme : 2 Capriccio et 2 intermezzi op.76, 3 intermezzi op.117 et 6 Klavierstucke op.118. Ce pianiste a de tels moyens qu’il n’y a pas d’entrave à ses options interprétatives. Un toucher tantôt velouté tantôt très dynamique, une grande fluidité (2e Capriccio, une merveille). On est surtout concerné par chaque note, comme pour l’onirique Intermezzo No. 3. C’est une alchimie de timbres qui prévaut pour l’Op.117 et le reste est l’avenant (la Ballade op.118 !). Et le tout est au seul service des partitions : une interprétation certes personnelle, souvent recueillie mais sans aucune des idiosyncrasies que l’on peut trouver chez certains de ses célèbres collègues d’origine russe. Et pour couronner le tout, le piano est excellent et très bien enregistré… Un maître disque.