Rencontre avec le quatuor Tana

Rencontre avec le quatuor Tana – Interview d’Antoine Maisonhaute, violon

Quatuor Tana - Shadows
Quatuor Tana – Shadows

Avec Antoine Maisonhaute

C’est à l’occasion de leur participation au Festival de Royaumont le 9 septembre prochain que j’ai rencontré Antoine Maisonhaute, l’un des deux violons du Quatuor Tana, au fameux restaurant Les Ondes à côté de la Maison de la Radio. Avec sa sœur Jeanne, violoncelliste, le violoniste Ivan Lebrun et l’altiste Maxime Desert, ce jeune quatuor – les 4 musiciens sont dans leur trentaine – a la particularité de se spécialiser dans la musique contemporaine : déjà plus de 150 créations à son actif.

Débuts

Ils se sont connus au Conservatoire royal de Bruxelles, un des seuls établissements qui avait appliqué dès 2001 la réforme universitaire dite de Bologne, alors qu’ils suivaient des masters de musique et de pédagogie ; C’est en 2011, suite à leur participation à l’Académie de Musique de Chambre du Festival d’Aix en Provence qu’ils décidèrent mettre à l’épreuve le quatuor, pendant deux ans, pour voir si le projet était viable dans la durée. Ils ont depuis abandonné leurs autres engagements et vivent exclusivement de leurs prestations en quatuor. Ils donnent 60 à 70 concerts par an selon les saisons.

Travail

« Les pièces classiques sont notre identité à partir desquelles on construit nos programmes dans lesquels on y associe des pièces contemporaines en recherchant des relations entre les œuvres. Pour les créations, deux cas de figure se présentent : soit il s’agit d’une commande d’un festival par exemple auquel cas on travaille l’œuvre au moins trois mois avant la création, soit il s’agit d’un travail collaboratif avec le compositeur qui nous soumet des extraits de partition que l’on annote le plus souvent sur tablette ; les moyens de communication modernes nous aident beaucoup. On joue toutes les esthétiques possibles, on pourrait donner trois fois plus de créations, mais on préfère travailler les œuvres en profondeur, en relation avec le compositeur. Il y a finalement peu de quatuors qui se dédient à la musique contemporaine (on peut citer les Arditti, le Jacks quartett aux USA, le UNTREF quartet chilien ou les italiens Prometeo.), encore moins qui associent création et répertoire (les Diotima). Le quatuor Tana se situe dans la lignée des quatuors Lasalle ou Italiano qui jouaient le répertoire mais aussi des pièces modernes.

On a donné récemment plusieurs fois le quatuor de Debussy dont l’interprétation a reçu un superbe accueil : la pratique des musiques contemporaines nous permet sans doute d’apporter des éclairages nouveaux sur des pièces du répertoire. »

Royaumont

« Lors du concert du 9 septembre nous mettrons en regard le 4e de Bartók avec une création d’Edwin Hillier, le 3e quatuor de Alex Mincek, un compositeur américain qui compose une musique motorique, répétitive, mais avec des timbres ‘à l’européenne’, un peu comme du Yann Robin répétitif, et enfin le 3e quatuor de ce dernier, que l’on joue très souvent depuis l’an dernier.
Il est intéressant de pouvoir montrer à Royaumont à de jeunes compositeurs comment composer des programmes de musique contemporaine avec une œuvre référence. »

L’instrument hybride

« On s’est fait une spécialité de l’instrumentation hybride : la possibilité d’interagir avec l’électronique sans recourir à une grosse machinerie, donc de façon aisément transportable. L’instrument est équipé en interne d’un petit haut-parleur avec un micro-capteur sur le chevalet, le musicien actionnant la partie numérique à l’aide d’une pédale. On a construit tout cela à partir de composants acquis via le net ». Mais autant visionner cette vidéo :

« Outre sa portabilité, l’avantage de ce système est que l’instrumentiste est au plus prêt de la diffusion électronique, ce qui est bien plus aisé en terme de travail. Le rapport à l’électronique redevient un rapport de musique de chambre.

Projets

A ma question traditionnelle « j’ai gagné au loto et vous finance le projet de vos rêves », la réponse est immédiate : Créer une école de musique à la façon de El systema au Venezuela, par exemple à un niveau régional : ça ne coûte pas très cher il y a eu une expérience à Marseille où 10 000 instruments ont été acquis pour 15 000 €. Mais il faut une volonté au niveau politique. Une autre possibilité serait de passer directement des commandes aux jeunes compositeurs.

Leurs principaux projets, après Royaumont, ce sera une tournée en Chine avec le programme du disque Shadows (Robin, Cendo, Bedrossian), en 2018 des concerts en Amérique du sud et aux USA. La création d’un nouveau quatuor de Régis Campo en 2018 et en 2019 d’un quatuor de Philippe Hurel.
« Et surtout la première d’un festival de musique à Lille « Versus » du 15 au 20 décembre prochain qui se déroulera dans des lieux ouverts, avec par exemple le deuxième quatuor de Feldman qui dure 5 heures. »
Mentionnons aussi la prochaine parution de leur nouveau CD « Volts », mais on y reviendra prochainement comme pour le CD Shadows. En attendant, une version de concert du 3e quatuor « Shadows » de Yann Robin :

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