Dvorak – Symphonie n° 8 Op.88 – Rafael Kubelik

Dvorak – Symphonie n° 8 Op.88 – Rafael Kubelik [EN]

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Résumé
On a une douzaine de versions Kubelík de la 8e de Dvorák.
Je voulais en faire le point quand est parue une discographie comparée dans le n° d’octobre de Diapason qui ne retenait pas la fameuse version de l’intégrale DG.
Dans une première partie, je réhabilite cette version. Puis fait le point sur les concerts dont je dispose.

On connaît mon attachement aux interprétations de Kubelík, et je fus assez étonné qu’aucune de ses 3 versions officielles n’ait été retenue dans la sélection finale de l’article comparatif paru dans Diapason d’octobre dernier.
J’avais entendu un jour cette 8e en cours de route à la radio et avais été impressionné par le caractère dansant et rhapsodique de l’orchestre : c’était Kubelík / Berlin, aussi ai-je été surpris de lire à propos de cette fameuse version : « Rien ne dit qu’à l’aveugle on y reconnaîtrait une baguette tchèque ».
L’auteur a retenu finalement Talich, le prédécesseur de Kubelík à la tête de l’orchestre philharmonique tchèque, un concert de Frantisek Stupka, le studio de Constantin Silvestri et la version Kertesz chez Decca. Les mélomanes ont toujours été divisés sur les mérites respectifs des 4 dernières symphonies par Kubelík et Kertesz. Mais comme je voulais depuis longtemps faire le point de la douzaine de versions de Kubelík à ma disposition – que je commence à mettre en ligne, j’ai repris d’abord rapidement cette comparaison.

Cette huitième symphonie Op.88 en sol majeur écrite en 1889 fut créée le 2 février 1890 à Prague par le compositeur au Rudolfinum. Il l’a dirigera avec un succès constant à Londres, Cambridge, Francfort et Chicago.
Elle fut écrite lors d’un séjour paisible à Vysoká où se trouve un musée Dvořák – Elle fut affublée de l’adjectif « anglaise » sans doute à cause du fait qu’elle fut publiée à Londres, mais aussi « Tchécoslovaque », probablement pour son côté pastoral et les nombreuses danses et passages pseudo-folkloriques qu’elle contient.
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Aussi je me propose de confronter ses 3 versions officielles (1946, 1948, 1966) au quatuor retenu dans Diapason, puis de faire le point sur ses enregistrements de concerts.

Studio

Le premier enregistrement studio est dû à Vaclav Talich en 1935, le second à Rafael Kubelík en 1946. Si Bruno Walter la joua régulièrement – il réalisa le 3e enregistrement publié,ce ne fut pas le cas de Furtwangler ou de Klemperer.

Vaclav Talich – (1883-1961)

Vaclav Talich fut d’abord violoniste, notamment au sein de l’Orchestre philharmonique de Berlin, après avoir étudié avec Nikisch entre autres ; il fut nommé à la tête de l’orchestre philharmonique tchèque reconstitué en 1918. Inquiété après la guerre pour de supposées collaborations avec les nazis, puis blanchi, il fut démis de toutes ses fonctions en 1948 par les communistes (année de l’exil de Kubelík), mais restera néanmoins actif avec son orchestre.

František Stupka (1879-1965)

Violoniste de formation, assistant de Talich à l’Orchestre philharmonique tchèque (1919-1939), il sera nommé conseiller de cet orchestre en 1956.

Constantin Silvestri (1913-1969)

Pianiste de formation, élève d’Enescu, il quittera la Roumanie en 1957 pour diriger ensuite principalement le Bournemouth symphony. Compositeur, il était aussi connu pour ses libertés interprétatives vis-à-vis des partitions. Il réalisa de nombreux enregistrements tant à l’Est qu’ensuite à l’Ouest.

Allegro con brio

Talich :  C’est, quoiqu’un peu lent, peut être mieux en 1935 qu’en 1951. Pour celle-ci, la prise de son n’est pas optimale, mais on entend les timbres fruités de l’orchestre d’alors. Les enchaînements sont d’une maîtrise impeccable, mais c’est très sérieux et manque de sourire.
Kubelík 1946 avec ce même orchestre : ce dernier paraît moins homogène, l’intro montre que ce sera poétique, un ou deux tunnels, mais l’ensemble est plus vivant (un trompettiste bien nasillard dans les 3 captations…).
Toujours le même orchestre en 1959 avec Stupka : c’est vivant, varié, mais le son est trop mauvais dans la copie que l’on m’a faite.
Kubelík – Philharmonia 1948 : on a enfin une prise de son correcte, même si le studio sonne étroit et mat. Un « 2e thème » magnifique. C’est un peu sage, mais c’est ce qu’on a entendu de mieux jusqu’ici.
Avec le même orchestre, Silvestri en studio en 1957 : c’est très décidé, dynamique, rapide, on peut effectivement aimer ça, la meilleure prestation orchestrale jusqu’ici, mais je trouve l’ensemble un peu extérieur, façon Dorati.
Kertesz – London symphony – 1963 : on a du drive, ça sonne moins idiomatique que les versions tchèques précédentes, mais il y a de l’animation, de l’élégance, très bel orchestre et très grand chef.
Kubelík – Berlin – 1966 : la version la plus récente de ce panorama a donc 48 ans… Dès l’intro, c’est « ça ». C’est bien la magie de cet enregistrement : arriver à faire sonner Berlin comme un super orchestre philharmonique tchèque. La prise de son est plus – trop – globale que celle de Decca. Les 8 et 9 ont été éditées en SACD au Japon : si la plus value est la même que pour les Mahler / DG, ce doit être quelque chose. Tout est là : le drive, la poésie, les rythmes…

Adagio

Talich 1951 est un peu ennuyeux, dans un tempo très lent, même si l’on distingue les belles couleurs de l’orchestre.
Kubelík 1948 : Les nuances de la partition sont bien mieux respectées, pas le plus beau violon solo du monde, ni la trompette d’ailleurs. On s’ennuie un peu aussi.
Kubelík 1946 : un peu plus vivant, le mieux jusqu’ici.
Silvestri : c’est un peu moins adagio, beaucoup de son et un mouvement qui raconte quelque chose et suscite l’écoute. C’est parfois un peu sollicité artificiellement mais « ça fonctionne » (enfin).
Kertesz à peu près dans le même tempo. Ça commence très bien, pour tourner un peu à vide par moments ensuite, manquant d’animation.
Kubelík 1966 : autant de son que les 2 précédents. Il y a, contrairement à ses 2 précédents enregistrements, une tension continue. C’est très supérieur.

Allegretto grazioso

On ne garde que les 3 plus « récentes » :
Silvestri : les phrases sont très décidées, de l’allant, un discours construit et maîtrisé. Superbe.
Kertesz : Très beaux phrasés, mais les fins de phrases manquent de tenue d’où l’impression d’un manque de vie avec une image d’orchestre un peu émaciée.
Kubelík : si la sonorité orchestrale est plus fondue, c’est plus poétique, tendre, bref grazioso.

Conclusion

On s’arrête là faute de temps. Pour moi la version Kubelík est exceptionnelle ; une découverte, celle de Silvestri, Kertesz étant un peu en-deçà.

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Concerts

D’après notre liste de concerts si incomplète, il l’aura dirigé près de 40 fois dans sa carrière. Voici les versions auxquelles on a accès :

19 5 46 Prague Smetana Hall Czech PO
8-9 10 48 London No.1 Studio, Abbey Road Philharmonia
8-9 6 66 Berlin Jesus-Christus-Kirche Berlin PO
10,  11 11 66 Munich Herkulesaal Bavarian RSO
8, 9 12 66 Chicago Chicago SO
11 6 67 Vienna Musikverein Bavarian RSO
4, 5 11 71 Munich Herkulesaal Bavarian RSO
3 6 75 Tokyo Hibiya Public Hall Bavarian RSO
17 5 76 Munich Herkulesaal Bavarian RSO
28 8 76 Luzern Kunsthaus Bavarian RSO
4 10 76 Ansbach Onoldiasaal Bavarian RSO
6, 7, 9 11 80 Chicago Chicago SO
7 9 82 Luzern Kunsthaus Bavarian RSO
13, 16 12 82 Philadelphia Philadelphia

Un tour rapide avec le 1er mouvement, avec des notes pour se repérer, même si j’étais infichu de retrouver certains CD… :
SOBR 1966 : vivante, chantante, très engagée, plus qu’avec Berlin, on ne peut s’empêcher d’écouter le mouvement en entier… cuivres splendides. 9
Chicago 1966 : Les cordes sont bien raides, l’orchestre de la bavaroise était meilleur à l’époque ! 7
SOBR 1967 : c’était capté en mono à la BBC, mauvais son, un pain aux cordes, assez mécanique 7
SOBR 1975 : Cela manque un peu d’engagement, mais c’est très chaleureux, avec des accompagnements aux cordes qui ressortent davantage. 8
SOBR 1976 – Festival de Vienne : mauvais son, lent, un peu plat. 7,5
SOBR 1976 – Ansbach : Ce sera « d’un trait » : c’est magique, juste dommage que la retransmission radio ait un peu compressé la dynamique. 9,5
SOBR 1976 – Lucerne : ici pas de reprise, ce devait dépendre de l’humeur du moment… Une lecture très vivante. 8,5
SOBR 1982 – Lucerne : c’est dans un tempo plus lent qu’à l’accoutumée. beau concert, mais moins habité que 6 ans auparavant. 8
Philadelphie 1982 : Cordes charnues, la « mayonnaise » prend progressivement, on a l’impression que toutes les sections de l’orchestre donnent leur maximum, enchantées d’être dirigées par un grand chef (qui ne les aura dirigé que cette fois-là semble-t-il !). Dommage que la captation soit si sale. 9

Conclusion : pour ceux que ça intéresse, il me restera à mettre en ligne la version SOBR 1966 après ces deux -ci…

 

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Dvorak - Symphony 8

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5 réflexions sur « Dvorak – Symphonie n° 8 Op.88 – Rafael Kubelik »

  1. Dans cette symphonie, Kubelik est tout-à-fait bon ! Mais je crois que je préfère encore Neumann, voire, dans une optique très différentes, mais néanmoins très défendable et très bien défendue, celle de Colin Davis.

    1. Je connais mal Neumann – Davis : que ce soit dans Stravinsky, Sibelius, je le trouve bien pâle… En cours les Nocturnes de Debussy : Stoko, Giulini, Haitink… et un live épatant de Kubelik que j’ai publié

  2. You did not mention the two Basil Cameron recordings – Symphony Orchestra Brunswick 30125-8 Reviewed in Gramophone January 1929
    National Symphony Orchestra Decca K 1263-7 Reviewed in Gramophone June 1948
    The first one is cut, so Talich is the first complete recording. The second was the first to appear after Talich I think, before Walter. It is available on CD or download.

    Your survey is very interesting. You suggest that Kubelik and Silvestri conducted the same London orchestra – this is not so, Kubelik conducted Philharmonia, the top EMI orchestra, Silvestri London Philharmonic, Boult’s orchestra in the 50s.

    I now most of these performances – to me both Talich are very good tho the sound is old. Sawallisch’s 1954 recording with Philharmonia also very good in a different way – his first recording with an international company, made because violinist Johanna Martzy would no co-operate with him on recordings of Mendelssohn and Mozart so they made this in the booked sessions. In good stereo sound Bělohlávek on Chandos from 90s.

  3. Bonjour, il faudrait que je réécoute Kubelik/Berlin, Szell et Stupka dont j’ai le bonheur de disposer… Mias je puis vous dire que l’audition à la radio voici qques années de Stupka m’avait laissé pantois, surtout dans le finale; dommage que vous ayez écarté son examen pour des raisons de qualité sonore.

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