Célimène Daudet – Messiaen – Debussy

L’année Debussy bat son plein. Je n’ai pas été étonné outre mesure de l’accueil réservé par certains distingués confrères aux récents CD Barenboim (Préludes I) ou Pollini (Préludes 2) : malgré certaines crispations digitales, comment ne pas être ému par l’évidence du discours et l’hédonisme sonore du premier ou, malgré une prise de son perfectible, par la maîtrise architecturale du second ?

Mais voici un nouveau CD de Célimène Daudet que j’avais repérée lors d’une radiodiffusion il y a maintenant quelque temps et que je n’ai pas eu encore l’occasion d’entendre ‘live’. J’ai commencé par Debussy : Brouillards et Feuilles mortes laissent un peu sur sa faim : il y a certes de belles couleurs, mais tout paraît un peu en demi-teintes, avec tout de même une lecture un peu plus décidée dans le deuxième. Le discours et la personnalité s’affirment avec une Puerta d’un tempo modéré mais prégnante, d’élégantes Fées, de superbes Bruyères. Un Général mutin à souhait, des Terrasses ‘sélénéennes’, etc. (mais encore quelle poésie pour les Tierces  et des Feux liquides (!) et sans esbroufe).
Du magnifique Debussy un peu comme une synthèse des deux lectures des pianistes cités au début, avec une remarquable maîtrise digitale toujours au service d’une grande musicalité.

Messiaen (1908-1992) : Et oui, ses Huit préludes ont été composés en 1928, soit seulement quelques quinze ans après ceux de son aîné. La parenté avec Debussy est plus qu’évidente, comme la composition de ce programme donc. Le style du Messiaen de la maturité transparaît parfois cependant (Les sons impalpables du rêve par exemple ou les Cloches d’angoisse et larmes d’adieu). Célimène Daudet nous fait voyager avec une grande artistry.

Une belle réussite (et en les réécoutant, j’aime bien ses Brouillards finalement !). Piano Yamaha d’une grande homogénéité de registres, peut-être un peu mat.

Je ne résiste pas à reproduire les commentaires synesthésiques de Messiaen (« gris velouté » !) :
1. La colombe
Orangé, veiné de violet
2. Chant d’extase dans un paysage triste
Gris, mauve, bleu de Prusse, pour le début
et la fin ; le milieu est diamanté, argenté.
3. Le nombre léger
Orangé, veiné de violet
4. Instants défunts
Gris velouté, reflets mauves et verts
5. Les sons impalpables du rêve
Polymodal, superposant un mode bleu-orange
en ostinato et cascades d’accords, à un mode
violet pourpre traité en timbre cuivré ; remarquer
l’écriture pianistique : triples notes, traits en accords,
canon par mouvement contraire, mains croisées,
staccatos divers, louré cuivré, effets de pierreries.
6. Cloches d’angoisses et larmes d’adieu
Les cloches mélangent des quantités de modes ; le
houm (résultante grave), et tous les harmoniques
supérieurs des cloches, se résolvent en vibrations
lumineuses ; l’adieu est pourpre, orangé, violet.
7. Plainte calme
Gris velouté, reflets mauves et verts
8. Un reflet dans le vent
La petite tempête qui ouvre et conclut la pièce
alterne l’orangé veiné de vert avec quelques
taches noires ; le développement central est plus
lumineux ; le second thème, très mélodique,
enrobé d’arpèges sinueux, est bleu orange pour
la première présentation, vert orange pour la
deuxième présentation. Couleurs dominantes
de toute l’œuvre : violet, orangé, pourpre.

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